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Le gouvernement britannique utilise les données sensibles de ses citoyens pour les influencer

Le gouvernement britannique utilise des données sensibles pour influencer le comportement des utilisateurs, rapporte le quotidien britannique The Guardian. Selon une nouvelle étude, la stratégie de gouvernement d’influence britannique consiste à utiliser des données sensibles en vue de l’élaboration de campagnes de modification des comportements.

Cette stratégie été boostée par l’essor des grandes entreprises technologiques, ont expliqué les chercheurs britanniques.

Théorie du nudge

Cette forme de gouvernance se base sur la théorie du nudge pour élaborer des politiques et sur une infrastructure d’annonces publicitaires en ligne. Cette union offre des occasions imprévues de mener des campagnes d’ajustement comportemental.

Concept issu des sciences du comportement, de la théorie politique et d’économie du secteur industriel, la théorie du nudge vise à modifier les comportements sans chercher à contraindre l’individu.

Le centre de recherches Scottish Centre for Crime and Justice Research (SCCJR) cite plusieurs exemples de campagne de modification comportementale. Certaines d’entre-elles visent à dissuader les jeunes de s’adonner à la cybercriminalité et de devenir des fraudeurs en ligne. D’autres programmes consistaient étonnamment à fournir de simples conseils pour allumer correctement une bougie.

La publicité ciblée est une pratique courante au sein toutes les entreprises. Toutefois, selon un des chercheurs britanniques, le fait que le gouvernement y ait recours pour favoriser des changements de comportement pourrait être une boucle de rétroaction parfaite.

« Via le gouvernement, vous pouvez accéder à toutes ces données et observer en temps réel à qui vous vous adressez d’un point de vue démographique. Et à l’autre extrémité, vous pouvez réellement constater si cela fonctionne », explique Ben Collier, chercheur de l’Université d’Édimbourg. « Le gouvernement qui a recours à cette tactique augmente sa capacité de fonctionnement réel. »

Données sensibles et modification comportementale

L’utilisation de tactiques de modification comportementale mineure par le gouvernement britannique a commencé durant la période David Cameron. Dès la fondation de la Behavioral Insight Team – ou « nudge unit » – au n° 10 de Downing Street, les ministres britanniques n’ont eu de cesse de rechercher des manières pour que les citoyens britanniques paient la taxe sur les voitures ou achètent de l’isolant pour combles, détaille le Guardian.

Le SCCJR a découvert plusieurs types d’influence gouvernementale sur les utilisateurs. Ces exemples vont de profondément sérieux à presque stupides. On trouve d’une part le programme « Cyber-Prevent » mis en place par la National Crime Agency, l’agence nationale d’application de la loi au Royaume-Uni. Cette campagne consiste à identifier les jeunes susceptibles de s’impliquer dans la cybercriminalité.

Certains pans de ce programme s’inspirent d’aspects de la campagne britannique de prévention anti-radicalisation. Cette campagne comprend des visites à domicile de la NCA pour tenter, avec les parents du jeune, de l’orienter vers une vie différente.

La NCA rassemble un volume substantiel de données sensibles sur les jeunes qu’elle rencontre. L’institution utilise ensuite cette information pour la création des profils des adolescents à risque typiques. On utilise par la suite ces profils pour le lancement de campagne de « police d’influence » via le ciblage d’annonces publicitaires destinées aux ados britanniques aimant les jeux et s’intéressant aux aspects de la cybercriminalité sur Google.

« La NCA a commencé à utiliser de simples publicités textuelles lors d’une campagne de six mois en collaboration avec des psychologues du comportement et via l’utilisation des données récoltées durant son travail opérationnel », ont expliqué les chercheurs.

D’autre part, le ministère de l’Intérieur britannique a également organisé une campagne de prévention des incendies basée sur le ciblage publicitaire. Lors de celle-ci, les autorités ont eu recours aux données d’achat Amazon via les catégories de ciblage du site d’e-commerce. Cette stratégie consistait à envoyer aux utilisateurs ayant acheté des bougies ou des allumettes, des conseils de sécurité via l’assistant personnel Alexa d’Amazon.

Dommages collatéraux

La réduction des incendies ou la prévention de la cybercriminalité via une campagne gouvernementale est quelque chose de positif. Toutefois, Collier et ses collègues avertissent que la montée en puissance du gouvernement d’influence pourrait causer des dommages collatéraux.

D’une part, ces campagnes d’influence comportementale encouragent les services à utiliser librement les données personnelles des citoyens.  D’autre part, elles sont susceptibles d’attirer négativement l’attention sur des groupes vulnérables et défavorisés d’une manière pouvant être contreproductive.

Par exemple, une série de publicités contre les crimes par arme blanche ciblaient les fans de musique hip-hop sur YouTube.

Toutefois, selon les chercheurs, être suivi sur Internet par des mentions liées à un genre de musique associé aux crimes par couteau pourrait faire en sorte que les jeunes pensent que le port de celui-ci est courant. Ils risquent ainsi d’être poussés à porter une arme.

Souvent, de telles campagnes sont sous-traitées par des agences de marketing tierces. Selon les chercheurs, cette pratique doit cesser.

« Il s’agit d’interventions politiques de premier ordre qui doivent être considérées comme telles. Ces campagnes doivent être soumises au même débat public, au même titre que d’autres politiques de ce type », soutiennent-ils. « Car, en effet, ces programmes d’influence ouvrent les espaces intimes des vies des citoyens au contrôle de l’État et étendent les sources de données sensibles utilisées par le gouvernement pour cibler la politique d’autre part ».

 

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