En mai 2020, la France va s’investir en masse dans la digitalisation de la santé avec l’ouverture du Health Data Hub. Cette plateforme va réunir l’ensemble des bases de données déjà existantes pour les mettre à portée des chercheurs. Elle servira à faire avancer de nombreux projets de recherche.
Pour rattraper son retard au niveau mondial dans la digitalisation de la santé, la France a officiellement lancé, début décembre, le Health Data Hub, une plateforme destinée à mettre à la disposition des chercheurs et des entreprises des données de santé de plusieurs millions de personnes. « On parle ici d’une base de données de vie réelle. Objectif : améliorer l’accès à ces données pour que des projets de recherche puissent tester leurs traitements ou d’autres solutions », a expliqué Rémy Choquet, directeur du centre de données médicales chez Roche Pharma.
Un audit de sécurité mené sur l’ensemble du hub avec l’Anssi
Le Health Data Hub sera disponible en mai 2020. Il prendra la succession du système national des données de santé (SNDS) qui ne regroupait qu’une partie des données récoltées. De plus, cette plateforme hébergera les données des passages aux urgences depuis 10 ans et des données fournies par la société française de cardiologie ou encore les informations des 1,5 million de patients versés par l’Institut national sur le cancer.
Protégé par la CNIL, le Health Data Hub se destine aux équipes de recherche ayant développé une application à base d’intelligence artificielle pour les professionnels de santé ou les patients. Ainsi, il aidera à la prévention ou la thérapie en se servant de l’analyse de données.
Pour rassurer tout le monde, le gouvernement a réalisé, avec l’appui de l’agence nationale de sécurité des systèmes d’information (Anssi) un audit de sécurité sur l’ensemble du hub. La structure a soumis la plateforme à « neuf scénarios de cyberattaque », et le bilan se revela « globalement positif ».
Microsoft Azure, « le seul capable de répondre à nos demandes »
Cependant, celà n’a pas suffi à convaincre. Des associations se plaignent que le gouvernement ait choisi l’Américain Microsoft Azure comme prestataire d’hébergement du Health Data Hub. Elles s’alarment notamment des risques de mainmises américaines sur les données françaises, mais aussi d’un phénomène qui s’apparenterait à une « privatisation de la santé ». La directrice du hub Stéphanie Combes à TICsanté a expliqué que la sélection du cloud Azure de Microsoft n’est « pas idéale » mais qu’elle correspond à un « choix d’opportunité » afin « d’aller vite » dans la mise en place de la plateforme.
« Nous avons rencontré tous les acteurs de l’écosystème. Nous avons commencé par les acteurs français : Thalès, OVH, Atos… Aucun n’était en mesure de faire ce que nous demandions. Puis nous avons rencontré Google, Amazon web services (AWS) et Microsoft » et ce dernier était « le seul capable de répondre à nos demandes. On a préféré aller vite pour ne pas prendre de retard et pénaliser la France par rapport aux autres pays, a encore justifié Stéphanie Combes.
Me Pierre Desmarais, lui, a indiqué que la loi américaine peut contraindre des entreprises informatiques nationales à lui à fournir des informations, mais que l’injonction doit concerner un crime ou un acte terrorisme. Donc a priori les données de santé ne sont pas concernées.
Quelques griefs soulevés
Une autre critique concerne la mise à disposition de données à destination d’acteurs privés. Demandera-t-on aux patients leur autorisation pour les diffuser ? Auront-ils un droit de rectification ou de retrait sur la base ? », s’inquiète le collectif La Quadrature du Net.
Enfin, certaines s’inquiètent de la fragilité du système mis en place pour garantir l’anonymat des données. Pour eux, la « pseudonymisation » des données garantit par le ministère de la santé (Drees) ne signifie pas une anonymisation à proprement parler. Ce qui rend théoriquement possible de retrouver l’identité d’une personne en recoupant plusieurs données lui appartenant.
Les plaignants souhaitent donc que les associations de patients seront étroitement associées à la gestion de la base. En posant certains garde-fous, assurément, « nous inventerons la médecine de demain, ici en France. », comme l’espère Emmanuel Macron.