Horizon nuageux pour le cloud « made in France »

Horizon nuageux pour le cloud « made in France »

13/11/2012 Non Par Borj Noe

En septembre 2012, deux géants des télécoms français ont annoncé le lancement d’un système de could computing français visant, excusez du peu, à concurrencer les mastodontes américains du secteur. Ainsi « Cloudwatt », le consortium réunissant Orange et Thalès, et « Numergy », groupement de SFR avec Bull, visent à défier les services de Google, Amazon ou encore  Microsoft pour n’en citer que quelques-uns. Mais alors que le détail de leur offre n’est pas attendu avant quelques mois, le projet fait déjà débat par des entreprises françaises.

Premier point d’achoppement ? Le financement de l’Etat, à hauteur de 75 millions d’euros pour chacun des deux projets. Déjà Interxion, géant français des centre de données, ainsi que des PME, tel Navaho, spécialisée dans les réseaux sociaux. Pour eux, ces deux projets concurrents sont chers et à la viabilité économique questionnable. « Ce sont des acteurs avec des coûts de fonctionnement élevés et, de ce que j’en vois, moins innovants que des PME comme Gandi ou Ikoula, sur qui on tire à bout portant », déplore M. Soucheyre, président de l’opérateur Neo Telecoms, opérateur de télécom international fondé en 2003.

 « Il n’est pas normal de financer en parallèle deux projets. On ne finance pas tout et son contraire ! », continue Didier Soucheyre. Ces deux projets ont en effet déjà derrière eux une histoire plutôt rocambolesque. Au printemps 2011, un premier projet de « cloud français » est proposé dans le cadre d’un partenariat public-privé baptisé « Andromède » qui doit créer un service français du cloud computing. Le consortium d’origine englobe Orange, Thalés et Dassault Systèmes, et devait être financé par une enveloppe de 135 millions d’euros de l’Etat, qui détiendra un tiers du consortium, dans le cadre du projet des « investissements d’avenir ». Mais en décembre 2011, suite à des différends avec Orange, Dassault claque la porte du projet et lance quelques mois après, avec SFR, un projet de cloud concurrent. Ainsi, le partenariat public-privé dut se dédoubler pour financer simultanément deux consortiums et non plus un seul, divisant ainsi l’enveloppe étatique en deux financements de 75 millions d’euros pour chacun des projets.

L’avantage compétitif mis en avant par les deux projets réside dans le fait que les données stockées sur le cloud seront stockées en France, ou tout du moins sur le sol français. Cet avantage est considérable car, pour le cloud des grandes entreprises américaines, les données sont stockées aux Etats-Unis. Bien que de nombreuses multinationales américaines aient un siège en Europe (à Dublin pour Google ou Amazon par exemple), les données qu’elles stockent peuvent être à tout moment rapatriées sur le sol américain en vertu du Patriot Act, une série de lois votées en 2001 dans le cadre de la lutte anti-terroriste qui autorise l’Etat américain à consulter des données privées, de particulier comme d’entreprises. Le secret industriel peut donc être violé par tout moment pour cause de sécurité nationale, ce qui peut inquiéter nombre d’entreprises soucieuses de conserver leurs projets secrets. « Le Safe Harbor [du Patriot Act] n’évince pas les règles nationales. Le Patriot Act est devenu un argument marketing utilisé habilement par la concurrence », explique Marc Mossé, directeur des affaires publiques et juridiques de Microsoft France.

Les deux projets français de cloud computing sont attendus pour le courant 2013. Cela sera l’occasion d’évaluer le potentiel d’innovation des entreprises français concernant les nouvelles technologies.

Robin Carond

Pour en savoir plus :

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